Nicole

J’ai un bon médecin

J’ai un bon médecin

Je connais un médecin dont le cabinet de consultation s’ouvre grand sous le ciel. Je m’y rends quotidiennement pour effectuer sur ses conseils une chorégraphie étrange. Je me ploie, je me plie, je me déploie, je me déplie, je m’écartèle, je m’étire et me ramasse, je saute, j’enjambe. Je sens mon sang courir, mes articulations s’assouplir.
Puis je me pose et me repose. Dissimulée dans un recoin, perdue dans mes pensées, je rumine ou médite selon la couleur de mon humeur, tournant en rond autour de mes soucis ou bâtissant mes résolutions.
Pour m’aider dans ce ménage mental, mon médecin me tend discrètement quelques ustensiles avec lesquels je coupe, j’arrache, je griffe, je sarcle, je dénude. J’éclaircis mes préoccupations et mes décisions.
Pendant tout ce temps, mon médecin bourdonne des choses confuses, frémit, caresse, souffle le chaud ou le froid. Il n’attend pas d’argent de ma part, et m’offre à chaque visite, en échange de quelques menus travaux, la saine fatigue, l’apaisement, la satisfaction du travail bien fait et toute son odorante médecine de soleil, en grandes brassées de sauge, de lavande et de romarin.

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